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Dans Specky Clark, vous partez de votre histoire familiale qui a nourri la création, quelle est la part de réalité et comment la transformez-vous ?
OONA DOHERTY : J’ai commencé à m’intéresser à mon histoire familiale il y a une dizaine d’années environ, en participant à un projet scénique où l’idée était de porter un regard sur l’histoire irlandaise à travers la généalogie des participants. Et j’ai découvert l’ère de mes arrière-arrière-grands-parents, dont ceux qui élevaient des cochons dans leur cour. Pour le spectacle, j’ai rassemblé les éléments les plus intéressants, sans nécessairement respecter la chronologie des générations. Mais l’un de mes arrière-grands-pères est réellement parti en bateau, de Glasgow, pour atterrir à Belfast. On l’appela Clark et comme il portait des lunettes, spectacles en anglais, on le surnomma Specky. Mais les deux tantes de la pièce appartiennent en réalité à la génération suivante. Et c’est en fait mon père qui a trouvé son premier emploi dans un abattoir où il devait réellement abattre les cochons !

Quand le monde de la danse vous avait découverte, c’était avec vos pièces se référant à la réalité urbaine. Et vous avez effectivement grandi près de Belfast, en Irlande du Nord, en territoire britannique, tout près des paysages irlandais avec leurs traditions et mythologies. Quel est votre rapport à ce patrimoine ?
O. D. : Je n’ai pas vraiment grandi avec la culture irlandaise puisque le système scolaire britannique n’en faisait pas un sujet. J’ai donc tout découvert lors de mes recherches pour la danse. Les parties surréelles de Specky Clark sont inspirées de la fête irlandaise de Samhain, la nuit où les tombes vont s’ouvrir et permettre de retrouver les défunts. Cette fête est la source de l’Halloween actuel. Par contre, le mythe du galop sur le dos du cochon rouge arrive ici sous une forme réimaginée pour le spectacle. En dehors de ces mythes, je m’inspire visuellement des tableaux de Francis Bacon et du peintre écossais Ken Currie, âgé de 65 ans. Son univers est peuplé de fantômes que Bacon peindrait probablement aujourd’hui s’il était encore en vie. Ensemble, ils expriment quelque chose des hauts et des bas de la vie et d’une forme de violence exercée par le fait même d’exister en ce monde.

Si à la fin, on danse vigoureusement à l’abattoir, Specky Clark est au moins autant un spectacle théâtral. On ne vous attendait pas sur ce terrain puisque vos créations précédentes, notamment Lady Magma et Navy Blue, étaient de plus en plus dansées.
O. D. : En effet, Specky Clark est pratiquement une pièce de théâtre où la chorégraphie est au service des dialogues. J’aime beaucoup ce style fait de micromouvements et de gestes répétitifs qui vont créer du sens. J’ai reçu une formation de clown avec la compagnie de danse néerlandaise Trash, connue pour la violence de son univers. Mais dans Specky Clark il s’agit avant tout de laisser parler cette généalogie qui, même transformée et en partie réimaginée, s’est inscrite en ma chair.

Propos recueillis par Thomas Hahn

Danse

2427 juin 2025

OONA DOHERTY

Specky Clark • Création