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Le succès de ce concours contemporain repose sur deux prémices radicales :tout le monde peut postuler, tout peut arriver. Mais il faut avoir quelque chose à défendre…

Pour le public, une journée à Danse élargie a peu de choses en commun avec une soirée habituelle. Pour les artistes, non plus. Le plus distinctif n’est peut-être pas l’audace, ni la diversité des propositions qui se succèdent à une cadence très soutenue. On s’y attend. En revanche, on sera surpris par le bouillonnement complice qui se crée dans la salle, voire dans le théâtre tout entier. Et pourtant, il s’agit d’un concours où la tension devrait être au plus haut ! En réalité, il y règne l’excitation d’un état de siège joyeux. Un hasard? Pas vraiment. Une telle ambiance s’installe quand on s’approprie, collectivement, un lieu officiel. L’occupation artistique est un événement d’autant plus jouissif que les « assaillants » sont pleinement légitimes.

Non pas une Zone À Défendre à construire, mais une Zone À Danser à investir

Répondant à une invitation, ils n’ont pas à construire une Zone À Défendre, mais peuvent investir une Zone À Danser. En toute liberté. Créé par Boris Charmatz et Emmanuel Demarcy-Mota, Danse élargie partage cet esprit, si rare et si précieux, avec une autre manifestation de grande ampleur, à savoir Camping, la rencontre mondiale des écoles d’art et de danse, imaginée et mise en place par Mathilde Monnier au Centre national de la danse (CND). Fusionnant les nationalités autant que les champs artistiques, les deux événements melting-pot se placent au cœur des enjeux actuels. Pour l’édition 2018 de Danse élargie, plus de quatre cent soixante compagnies, de soixante-et-onze pays tentent leur chance pour faire partie des dix-huit finalistes. Par comparaison, en 2010, lors de la première édition, la sélection affichait encore une forte dominante hexagonale. Mais en 2012 déjà, les vingt équipes retenues représentaient quatorze pays différents. Au rayonnement mondial s’ajoute la passion pour la liberté d’invention. Quant au CND, Mathilde Monnier, qui a elle-même été membre du jury Danse élargie en 2014, stipule que celui-ci est « un centre d’art pour la danse »! Autrement dit : le danseur s’inscrit dans un champ artistique où toutes les disciplines sont appelées à se fédérer, des arts plastiques à la littérature, des arts visuels au cirque… Mais si chaque art est effectivement traversé par d’autres, aucun ne l’est autant que la danse. Et nulle part cette universalité n’est défendue avec autant d’acuité qu’à Danse élargie, concours à l’esprit solidaire, où même les membres du jury représentent à chaque édition un mélange des disciplines. Au départ, tout ceci paraissait parfaitement incongru. Une comédienne (Valérie Dréville, tout de même) ou un musicien (Médéric Collignon) dans un jury de danse? Quatorze membres, et seulement quatre chorégraphes ? C’était en 2010. Aujourd’hui, l’équilibre a été trouvé. La moitié des jurés sont chorégraphes. Et on a compris : rien ne fédère autant les artistes qu’un concours, à condition que l’évènement sache dialoguer avec l’utopie, pour que les énergies créées ensemble vaillent plus qu’un prix à gagner. En effet, parmi les participants ayant entamé des carrières fulgurantes, on peut citer Noé Soulier, Mitkhal Alzghaïr, (LA)HORDE, Tatiana Julien, Lénio Kaklea ou Mohamed El Khatib. Et tous n’ont pas été lauréats!

Thomas Hahn


TÉMOIGNAGES

Mohamed El Khatib (Sheep, 2010)

Pour moi, un tel concours est la voie la plus démocratique, avec zéro cooptation. Tout le monde peut postuler, même sans avoir rien produit avant! Pour une jeune équipe, pouvoir montrer un peu de son travail à Paris, ça compte. Et puis, évoluer sur le plateau où s’est produite Pina Bausch: un vrai fantasme! Nous sommes quelques-uns à être passés par là et à avoir tracé nos routes, comme Noé Soulier par exemple. Mais ce qui nous réunit, c’est tout de même ce concours. J’y ai vu tellement de propositions folles que j’ai arrêté de me poser la question des genres. Et j’ai été repéré par le Théâtre de la Ville. Ils sont venus à tous mes spectacles et, sept ans plus tard, m’ont proposé d’être artiste associé.

Dorothée Munyaneza (membre du jury, 2016)

Danse élargie réunit des artistes de tous bords, toutes disciplines confondues travaillant sur l’occupation du plateau sous toutes ses formes, dans un esprit de partage. 2016 a été marqué par la forte présence d’artistes sud-coréens, sur le plateau et dans le jury avec des personnalités aussi brillantes et généreuses qu’Eun-Me Ahn, Lucinda Childs ou Vincent Macaigne. Le fait que le jury soit exclusivement composé d’artistes est important pour les compagnies du concours. Ils savent que le jury veille avec générosité et exigence, mais donne aussi des retours sensibles. Nous voulons transmettre notre expérience et encourager. En suivant le concours les membres du jury, se revoient à une époque où ils avaient eux-mêmes besoin d’être portés et encouragés.

Mithkal Alzghaïr (Déplacement, 1er prix 2016)

J’étais encore tout au début et heureux de présenter mon travail. Je ne pensais même pas à l’aspect compétition. Mais une fois embarqué, on a le désir d’arriver en finale. Avoir réussi m’a rassuré en tant qu’artiste ainsi que ceux qui m’ont aidé en coproduisant Déplacement. Les échanges avec le jury étaient stimulants, notamment avec Tiago Guedes, qui m’a invité à son festival au Portugal. Je suis surtout content des retours sur ma démarche artistique, d’un regard qui ne s’est pas arrêté à une histoire d’exil et de migration.

Danse Elargie est organisé par le Théâtre de la Ville, le Musée de la Danse de Rennes et la Fondation d’Entreprise Hermès, avec le soutien de la SACD

*Le CND offre la possibilité à une équipe finaliste – parmi les projets sélectionnés en février – de participer à une semaine de workshop dans le cadre de Camping (plateforme chorégraphique internationale) qui aura lieu du 18 au 29 juin 2018 au CND à Pantin.

Temps forts

1617 juin 2018

Danse élargie

5e édition